Maître Choi

L'hapkido est un art martial coréen qui ressemble par le nom et les techniques à l'aïkido japonais.
Maître Choi Young Shul est né en Corée en 1904. Il pratique différentes disciplines coréennes de combat et se rend au Japon où, de 1919 à 1946, il étudiera au sein de plusieurs écoles de Jû Jutsu et d'Aïki Jutsu.

Il devient notamment le disciple du maître Takeda Sokaku (1858-1943) fondateur de l'école Daitô d'Aïki Jutsu.Takoda a également pour disciple Ueshiba Morihei (1883-1969) le futur fondateur de l'Aïkido.En 1946, Choi est de retour en Corée, il commence alors à élaborer un style personnel,synthèse de Jû Jutsu, d'Aïki Jutsu et de diverses méthodes coréennes. En 1948, prenant modèle sur son ancien condisciple Ueshiba Morihei, Choi Young Shul donne à sa méthode le nom définitif de Hap-Ki-Do, la voie des énergies unifiées.
En France l'Hapkido fait son apparition dans les années 70, en même temps que le Taekwondo (Karaté coréen).En 1999, l'Hapkido s'associe à la F.F.T.D.A., fédération française de Taekwondo et disciplines associées.


Voici maintenant une très bonne interview de Maître Bok-Sup-Suh parue dans Karaté Bushido d'octobre 2000.

Maître Bok-Sup-Suh

Le maître Yong Sul Choi (décédé en 1986) étudia les arts martiaux au Japon avant de rentrer dans sa Corée natale pour y fonder l'Hapkido.
Le début d'une grande aventure commençait, mais tout ne fut pas facile...
Maitre Bok-Sup Suh fut la première ceinture noire du fondateur de l'Hapkido, maître Yong Sul Choi. Dans cet entretien exclusif accordé à Serge Baubil, il dévoile une partie méconnue de l'histoire de l'Hapkido.

Karaté Bushido : Dans l'histoire du Hapkido que nous pouvons lire à travers de nombreux livres, c'est vous qui avez donné un emploi dans votre entreprise à maître Choi à son retour du Japon. Vous étiez, à l'époque, ceinture noire de judo et aviez été surpris par l'habileté de maître Choi à la suite d'une bagarre. Vous lui aviez demandé de devenir son élève. Pouvez-vous nous dire exactement comment cela s'est déroulé ?

Professeur Suh: Vers la fin des années 40, j'étais propriétaire d'une brasserie dans laquelle nous produisions du vin coréen ainsi que du Brandy américain. C'était une époque économiquement très difficile pour les Coréens. Tous les matins, des gens faisaient la queue en ligne droite devant ma brasserie pour obtenir des restes de grains que nous disposions comme ordures. Un matin, de l'étage supérieur de la brasserie, j'entendis du bruit et une dispute à l'extérieur. Je vis des gens qui se bousculaient. Parmi eux se trouvait un homme qui avait pris une position de combat comme je n'en avais jamais vu auparavant. Il ne s'était pas battu. Personne ne l'avait attaqué. Les gens le regardaient et immédiatement la bousculade s'est terminée. Je suis sorti le rencontrer. Je lui ai demandé de venir à l'intérieur de la brasserie pour lui parler. Rendu à l'intérieur, je lui ai demandé : " Quel art martial pratiquez-vous ? ". Choi me répondit: " Pourquoi voulez-vous le savoir ? ". Je lui ai répondu : " Je suis ceinture noire premier dan de judo et je pratique aussi la boxe et d'autres méthodes de combat et j'aimerais apprendre de vous". Choi répondit: " Avec votre judo, pourquoi n'essayez-vous pas de me
projeter ? ". J'ai accepté et nous nous sommes déplacés dans une salle adjacente où nous entreposions des bouteilles. Choi me dit: " Essaie de me projeter ".
Étant le patron et le fait que j'étais plus jeune que lui, ce n'était pas les meilleures conditions pour le projeter. J'ai retiré ma blouse de travail et j'ai seulement saisi le revers de sa chemise. Immédiatement, il appliqua une clé de poignet. J'avais été respectueux en le saisissant seulement, sans le projeter, mais lui, il appliqua une force terrible.
Pour ne pas perdre la face devant mes employés, je décidai de vraiment le projeter. Aussitôt saisi, Choi appliqua une autre clé sur moi. Je lui ai demandé : " Quel art martial pratiquez-vous ? ". Choi répondit: " c'est du Yawara ". " Que faites vous dans la vie ? ". Il répondit: " Je vends du pain dans la rue. Je viens ici le matin pour ramasser du grain pour nourrir mes porcs ".
Je lui ai demandé s'il avait enseigné son art à d'autres Coréens. Il me répondit que non. À la question où avait-il apprit cet art, il me dit qu'il avait l'étudié au Japon et que celui-ci n'était enseigné uniquement que dans la cour impériale japonaise. A l'origine, dit-il, cet art était pratiqué durant la dynastie Silla en Corée. Je lui ai proposé un marché secret : " Je vais subvenir à tous vos besoins, mais vous n'enseignerez qu'à moi ". Pendant deux années, j'ai pratiqué avec lui tous les jours.

K.B.: Comment s'est diffusé cet art martial ?

Pr. Suh: En 1954, mon père se présenta comme candidat à l'Assemblée Nationale. Le parti au pouvoir utilisait des fiers à bras et, pour intimider mon père, un gaillard fut envoyé pour me tabasser. Il me saisit. Par crainte de représailles, je ne lui ai pas cassé le poignet. Je me suis penché et je lui ai donné un coup de pied latéral. Le fier à bras revint, accompagné de son frère, qui était un boxeur de renom. Au premier coup de poing, je me suis penché et j'ai esquivé le coup pour ensuite lui appliquer une clé de bras. Le boxeur tenta de me projeter mais n'a pu le faire. Je lui ai asséné un coup de tête et par la suite, je n'ai plus eu de problème avec ces types. Mon père gagna son siège à l'Assemblée Nationale, Après ces altercations avec ces fiers à bras, des gens commencèrent à m'appeler " grand Frère ". Petit à petit, Choi et moi devînmes connus. On nous demanda de faire une démonstration à la ville de Taegu, la 3ème ville de Corée, dans la cour de justice où l'on avait placé un tapis sur le plancher. Il y avait des juges et des procureurs présents. Après la démonstration, ils nous demandèrent de diffuser cet art. Une deuxième démonstration fut donnée à l'université de Young Nam. Maître Choi parlait peu et démontrait peu de techniques. C'est, surtout moi qui parlais et faisais les démonstrations. Avant de commencer la démonstration, je demandai s'il y avait dans la foule des volontaires qui voulaient tenter de nous projeter. Nous fûmes ravis que le capitaine de Judo accepte. Au moment de sa saisie, je lui ai appliqué une clé de poignet. Il tenta la même chose sur maître Choi et aussitôt lui aussi lui appliqua une clé de poignet. Le capitaine de Judo devint furieux et il attaqua plusieurs fois Maître Choi avec à chaque fois plus de puissance. En utilisant l'énergie de son attaquant, Maître Choi faisait virevolter celui-ci dans toutes les directions.

K.B. : Lorsque vous donniez des démonstrations, comment appeliez-vous cet art ?

Pr. Suh : Hapki Yu Kwon Sul. Lors d'une de nos démonstrations, un professeur japonais a vu cet art et nous a dit : " votre art se nomme Aikido au Japon ". Choi a spécifié en disant : " Cela est du Yawara". Choi l'écrivit en japonais et le professeur japonais répondit: " En langue japonaise, cela veut dire Aikido ".

K.B : Dans l'art que vous avez appris de Maître Choi, quelle place avaient les coups de pieds ?

Pr. Suh : Il y avait très peu de coups de pied à l'époque. C'est plus tard que les Maîtres Ji Han Jae et Kim Moo Wong incorporèrent les coups de pied et ce fut Ji Han Jae qui a changé le nom de Hapki Yukwonsul pour Hapkido

K.B.: Est-ce que maître Choi vous a dit comment et combien de temps avait-il été l'élève de Sokaku Takeda ?

Pr. Suh : non, ce que je sais c'est qu'en arrivant au Japon, il se retrouva dans un temple bouddhiste et que plus tard il se retrouva dans la maison de Takeda Sokaku, mais il n'a jamais certifié qu'il fut l'élève de Takeda. Aujourd'hui les gens ignorent la vraie histoire du Hapkido; Par exemple, savent-ils que, dans le véritable arbre généalogique du Hapkido, je suis directement après le maître Choi Yong Sul et devant maître Ji Han Jae et autres ? Sans oublier que c'est moi qui ai ouvert les deux premiers dojangs en Corée.


Texte de Serge Baubil. Article publié dans Karaté Bushido en octobre 2000. Vous pouvez commander ce numéros de K.B. en cliquant ici.

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